jeudi 27 mars 2014

Syndrome de noonan et vie familiale

Dans cette partie, j'ai voulu partager ce que nous avons vécu et ce que nous vivons avec d'autres parents et des enfants porteurs du syndrôme de Noonan.

Vivre avec un enfant malade nous conduit sans que nous le souhaitons vers la solitude. En effet, le peu de connaissance que nous avons sur la maladie et le devenir de notre enfant, le quotidien qui nécessite une adaptation et des ajustements.... font souvent que nous nous sentons souvent seuls et démunis devant la maladie et l'évolution de notre enfant.

Il suffit de lire les quelques messages déposés sur les forums pour se rendre compte de la détresse , de l'angoisse, du manque d'informations.... des parents qui souhaitent le meilleur pour leurs enfants.

Dans cette partie, vous allez donc lire ce que nous vivons et ce que nous avons vécu, avec des joies , des grands bonheurs, des angoisses, et des grandes tristesses.

Après cette lecture, j'espère que cela vous donnera envie de venir témoigner et partager vos expériences.


Un peu d'historique....

Notre fille est née d'un désir de grossesse de 5 ans. Ne parvenant pas à être enceinte, j'ai fait 4 FIV. La 4ème a été la bonne. C'était en octobre 2009. J'étais la plus heureuse des futures mamans.

J'ai eu une grossesse plutôt normale avec quelques aléas.
A 3 mois, j'ai fait une amniocentèse car ma prise de sang n'était pas bonne. J'étais inquiète car j'avais peur que notre enfant ait une maladie et que nous la perdions.
Une fois l'examen passé, je me suis dit que compte tenu que nous avions attendu longtemps pour l'avoir, elle ne pouvait qu'être en bonne santé. Quinze jours se sont passés et le résultat n'a pas révélé d'anomalie.

A la fin du second trimestre, mon gynécologue a constaté que j'avais beaucoup de liquide amniotique. J'ai fait un test pour le diabète qui est revenu négatif.
Au 8ème mois de grossesse, devant un ventre très volumineux (on me disait que j'attendais des jumeaux), le gynécologue a prescrit une échographie 3D pour voir si le bébé allait bien. L'écho n'a pas révélé d'anomalie.

Quinze jours plus tard, je suis rentrée à la clinique pour accoucher par césarienne. A mon réveil, les soignants m'ont donnée ma fille et spontanément je leur ai dit qu'elle était parfaite. Je la trouvais très belle et j'étais enfin maman pour la 2ème fois.
Elle mesurait 48 cm et pesait 3.9kg et elle était plutôt gourmande.

Cinq jours après sa naissance, elle a commencé à avoir des RGO et j'ai remarqué quelle avait une peau hyper fragile. Nous sommes sortis de l'hôpital et elle n'avait pas encore repris son poids perdu de façon normal à la naissance.
A la maison les RGO se sont multipliés, elle têtait de façon inutile et prenait 7 biberons de 60 ml qu'elle vomissait souvent. Sa prise de poids par jour était en moyenne de 10 g/jour alors que normalement un bébé prend 20 à 30g par jour. Devant ce manque d'appétit, cette non-prise de poids, je me sentais impuissante et j'ai très mal vécu ces semaines.

Elle a été finalement hospitalisée pendant 3 semaines où elle a eu beaucoup d'examens. Elle ne mangeait pas mieux. Elle a eu une sonde naso-gastrique pour l'alimenter pendant 2 jours mais elle vomissait toujours.

L'équipe pédiatrique m'a parlé du syndrome de Noonan et a demandé une analyse génétique sur 4 gènes qui est revenu négative 2 mois après.

Elle a eu un régime hypercalorique avec Magimix et dextrine maltose jusqu'à 4 mois. Ensuite, le médecin traitant a décidé de tout arrêter et de passer aux biberons de carottes et une diversification aux fruits et légumes qui a très bien fonctionnée. Elle buvait environ 800 à 1100 ml par jour sans reflux. Elle a commencé à prendre du poids et à grandir. Sa courbe de poids et de croissance étaient à la limite inférieure.

D'un point de vue des acquisitions, bébé elle a été identifiée comme hypotonique et il y avait un léger décalage des acquisitions qui s'est ensuite confirmé.
Je sentais qu'elle était différente mais je ne savais pas ce qu'elle avait. D'un autre coté, j'espérais juste que c'était un mauvais départ et quelle n'avait rien.
Elle s'est tenue assise à 10 mois. Elle était plutôt souriante et joyeuse.
J'ai commencé vraiment à m'inquiéter lorsque j'ai vu qu'à 12 mois elle ne se tenait pas debout par manque de force et de tonicité, ne cherchait pas à marcher, ni à faire du 4 pattes. Elle ne cherchait pas ou ne pouvait pas aller chercher les jouets qu'on lui proposait. Elle pleurait ou criait pour qu'on les lui donne.

A 14 mois, elle commençait à se mettre debout avec de l'aide. Elle semblait toujours ne pas avoir de force. En parallèle, elle disait quelques mot ou en répétait?
Je l'ai mise dans un trotteur plusieurs fois dans la journée pour qu'elle marche, se muscle, apprécie à se déplacer seule.

A 17 mois, elle faisait ses premiers pas à l'aide de ma main droite. Elle n'a pas voulu se lâcher avant ses 25 mois. Quand je lui demandais de se lâcher, elle était terrifiée, hurlait et s'asseyait par terre et me disait parfois qu'elle ne pouvait pas.

Coté maladies infantiles, de sa naissance à environ 8-9 mois elle a fait des rhino à répétition avec parfois des complications nécessitant la prescription de séances de kiné respiratoires. Ensuite, elle a eu un épisode de gastro. C'est là que nous nous sommes rendus compte qu'elle avait une intolérance au lactose.
Vers 17-18 mois, elle a commencé à avoir des otites. Il faut savoir que les otites sont à priori une caractéristique commune aux enfants porteurs du syndrome de noonan et qu' il faut y être très vigilant (perte audition possible).
D'un point de vue médical, je dirai qu'elle n'a pas eu beaucoup de répit, toujours malade!

Lors d'une gastro en décembre 2011, elle a été hospitalisée. L'équipe pédiatrique m'a parlé de nouveau du syndrome de Noonan. Je leur ai expliqué qu'elle avait déjà eu les  tests génétiques qui étaient revenus négatifs. Je ne savais pas que 10 gênes étaient impliqués dans le syndrome de Noonan.
Devant leur insistance, j'ai décidé de demander l'avis d'un autre pédiatre sans lui donner aucune information sur le vécu de ma fille. Au bout de 3/4 d'heure d'auscultation, la pédiatre m'a dit " si j'étais sa maman, je ferai des tests génétiques et j'irai voir un neuro pédiatre".
J'ai compris qu'il fallait que nous fassions quelque chose.

J'ai pris rendez vous à l'hôpital Necker à Paris. Au bout de 2 heures, nous savions que notre fille avait soit un syndrome de Noonan ou soit un Syndrome Cardio facio cutané (CFC). Nous avons donné notre accord pour une seconde analyse génétique à partir du sang prélevé lors de la première recherche. Un retour nous est parvenu le 16 juin par courrier. Ce courrier nous disait que notre fille avait une maladie mais pas laquelle. J'ai voulu savoir aussitôt ce qu'elle avait mais j'ai dû attendre le 29 juin 2012 pour avoir le nom du syndrome. En fait, le protocole médical dit que les médecins n'ont pas droit de donner le nom de la maladie par téléphone. C'est juste affreux. Je me suis juste dit que les choses étaient mal faites et qu'on oubliait que nous étions avant tout des parents très inquiets avec une petite fille qui a une maladie dont on attendait le diagnostic depuis sa naissance. Pendant 13 jours, j'ai juste pu imaginer toutes les maladies possibles et inimaginables sans avoir de réponse. Je crois que ne pas savoir était la pire des choses.

Le 29 juin 2012, c'est la pédiatre de ma fille qui m'a annoncé qu'elle avait un syndrôme de Noonan. Avant d'aller à ce RDV je ne savais plus si elle pouvait avoir une tumeur à la tête du fait de son fort périmètre cranien ou une maladie génétique.

L'annonce de la maladie a été difficile à vivre. Ce que je ressentais était assez bizarre car d'un coté je me sentais soulagée car je savais ce qu'elle avait et d'un autre coté j'étais envahie par une immense tristesse. Il s'agissait de ma petite fille, elle était malade, le diagnostic était tombé et la situation était irréversible. 
D'un naturel plutôt réactif, j'ai écrit le jour même un email aux 2 docteurs qui m'avaient reçus en février. Je leur ai posé toutes mes questions. J'étais consciente qu'ils n'auraient pas toutes les réponses mais je n'allais certainement pas garder ses questions pour moi qui étaient source de stress.

Le 4 Juillet, j'ai été accueillie à l'hôpital Necker par le Dr Caumes, généticienne et le Pr Hadj Rabia, dermatologue pour parler du syndrôme de ma fille et pour répondre à mes questions. Dr Caumes est une femme pausée, dotée d'une grande capacité d'écoute, et orientée vers un dialogue constructif. Dr Hadj Rabia a les mêmes qualités que le Dr Caumes. Il a fait plus pour nous, puisque lors de notre premier RDV, il a pris tous les examens que notre fille avait passé. Il nous a expliqué pourquoi on lui avait prescrit ces examens et comment on devait interpréter les résultats. Ces deux médecins ont répondu à toutes mes questions le plus précisément possible en ne me cachant pas que certaines réponses dépendaient du développement de notre fille. La conclusion que j'en ai faite est que ma fille avait un syndrome de Noonan mais elle était atteinte de façon légère puisqu'elle avait un retard léger des acquisitions et pas de retard de langage. Elle connaissait une cinquantaine de mots à l'âge de 2 ans et commençait à faire des phrases de 2-3 mots.

Il s'est passé un mois, et notre fille a commencé la marche de façon autonome (à 25 mois). J'étais si émue et si heureuse. Je crois que j' ai eu des larmes de bonheur pendant 15 jours. Dès que je la voyais si petite (74 cm) en train de faire ses petits pas que j'avais tant attendus (et peut être qu'elle avait attendue aussi?).

En Septembre 2012, elle a commencé ses séances de psychomotricité (3/4h par semaine). Elle a appris énormément en peu de temps. En novembre 2012, j'ai fait part d'un constat au psychomot: ma fille était en train de mettre de coté ses compétences au niveau du langage. En février la nounou, ma famille et le centre arrivaient tous au même constat. Ma fille disait des mots isolés qu'elle ne réutilisait plus ensuite pendant longtemps, revenait vers des babillages de bébé.
Je ne sais pas si cela fait partie de son développement ou est ce une conséquence de l'annonce de la maladie: a t elle ressenti toute notre angoisse? Je ne sais pas.
Pour le moment je patiente. Je continue de jouer avec elle. Je lui parle énormément. Je lui explique tout ce que l'on fait. Je me dis que même si elle ne parle pas, au moins elle est bercée dans les mots.


Comment je vis les choses?

L'annonce de la maladie a été difficile. Il a fallu du temps pour digérer.
Ce n'était plus des suppositions mais bien un diagnostic médical avec un papier mentionnant qu'elle était porteuse du syndrome de Noonan et le gène muté en question. C'est génétique et il n'y a pas de traitement. La seule chose qui peut aider ma fille c'est la qualité et la précocité de la prise en charge.

Ensuite, je suis passée par différentes phases. J'ai été en colère car  je pensais être responsable de la maladie de ma fille. Je l'ai voulu, porté donc je lui avais forcément transmis. Puis le sentiment de culpabilité a disparu. Désormais, je porte la maladie de ma fille et j'ai décidé de l'accompagner pour l'aider, et qu'elle ait une vie la meilleure possible.

Je rencontre des obstacles au quotidien. C'est épuisant, c'est aussi formateur.


Quelle est ma vision des choses?

J'ai fait le deuil de certaines choses quant aux possibilités et à l'avenir de ma fille. Je sais par exemple qu'il est peu probable qu'elle ait ses propres enfants car le risque de transmission est de plus de 50%; Elle pourra en avoir par don d'ovocytes. Mais d'ici là la recherche et la médecine auront peut être fait des progrès.

Ce qui n'est pas facile, c'est que je suis consciente que ma fille est différente mais je ne sais pas quels sont les choses auxquelles je dois renoncer:

- Va t elle reparler un jour?

- Va t- elle jouer comme les autres enfants?

- Va t- elle avoir des cheveux?

- Va t-elle savoir lire et écrire?

- Suivre une scolarité normale?

- Avoir un métier?

- Avoir un travail?

- S'occuper d'elle de façon autonome?

- Avoir une famille

Comme à toutes ces questions, je n'ai pas de réponses et personne n'a d'ailleurs de réponse car pas assez de retour sur la maladie, je ne m'autorise pas à me les poser et j'essaie de vivre le moment présent et de profiter de ce que ma fille nous "donne" et de que nous pouvons lui apporter.

Le point positif pour moi est que la vision de la vie est désormais différente. Je ne me prends plus la tête pour des broutilles et il m'arrive même parfois de ne pas comprendre les plaintes de mon entourage. Disons que je n'ai plus les mêmes priorités qu'avant.

Avoir un enfant malade est je crois la pire des choses qui puisse arriver à un parent et à l'enfant lui même parce que c'est une souffrance qu'on ne peut même pas mesurer et surtout nous sommes uniquement "spectateur ", nos actions pour aider notre enfant sont très limitées.  C'est aussi un énorme bonheur car lorsque ma fille fait le moindre petit progrès c'est une grande victoire et en plus elle nous fait de supers calins.

Comment nous organisons nous?

La maladie, quelque soit elle, bouleverse l'organisation de la famille. Chaque membre de la famille doit chercher sa place et contribuer à son équilibre. Ce n'est pas un exercice évident.

J'ai choisi de m'occuper de ma fille c'est à dire d'être présente à tous ses RDV. Je partage les résultats et les décisions des médecins avec mon mari.  Je donne les informations nécessaires à la bonne compréhension de la maladie et au développement de notre fille à son frère. S'il a besoin d'en parler nous sommes toujours là pour l'écouter et répondre à ses questions. Il est important de donner un place à chaque enfant de la famille.

Je pense que pour mon fils, cela n'est pas très évident. Il ne se plaint jamais. Il s'occupe de sa sœur comme si de rien était. Ils se cherchent, rigolent souvent ensemble. Je trouve leur relation superbe.

Nous essayons d'avoir une vie la plus simple possible en essayant que la maladie ne soit pas au cœur de nos préoccupations. Nous avons des loisirs, des moments à nous et des moments avec les enfants. Nous partons en vacances, en WE ... et nous nous adaptons en fonction des besoins de chacun.

La vie ne s'est pas arrêtée, elle a juste pris un tournant différent d'une vie traditionnelle. Parfois elle parait simple et d'autres fois complexe. Parfois on oublie la maladie et parfois elle nous rattrape.


Quel est le suivi de la maladie?

C'est essentiellement la prise en charge dans le centre de rééducation et surtout les examens médicaux et visites chez le médecin pour les maladies infantiles.

J'ai pris du temps à " sélectionner" les médecins et soignants qui nous entourent. Je ne voulais pas avoir à faire à des personnes stressées mais des personnes dotées d'une grande écoute, capable de comprendre et de conseiller.

Je travaille à 80% et je prends tous mes mercredis pour accompagner ma fille à tous ses RDV. J'ai un agenda bien rempli et cela demande beaucoup de déplacements situés entre 25 et 40 km de la maison.

Pour notre fille, tout l'aspect médical est devenu difficile à vivre (stress et angoisse) et pour moi, cela devient de plus en plus lourd à gérer.  Nous avons besoin toutes les deux "d'oxygène".

Je passe du temps avec ma fille depuis qu'elle est née pour lui apprendre des choses. Pour progresser chez un Noonan, il est conseillé de stimuler l'enfant, de répéter les jeux et l'apprentissage jusqu'à complète assimilation.

En semaine, après le travail , je passe environ 1/2 à 3/4 d'heure à la stimuler et lui apprendre des choses (puzzle à encastrer, dessins, histoires, chansons, vélo., cuisine...).

La difficulté que je rencontre est son manque d'intérêt pour les jouets et jeux que je lui propose.

En week end , elle est toujours avec moi. Les gens parlent de relation fusionnelle.

Je me dis juste que c'est ma petite fille et quelle ne mérite certainement pas ce qui lui arrive. J'espère de tout cœur qu'elle arrivera à être épanouie et heureuse dans sa vie et que le regard des autres ne sera pas trop lourd pour elle.


La famille, les amis et la maladie;

La maladie de ma fille m'a beaucoup rapproché de ma maman et de mes 2 grandes sœurs. Dès le début maman m'a beaucoup aidé moralement, psychologiquement et physiquement. Elle prend par ex ma fille une semaine pendant les vacances scolaires ce qui me permet de souffler un peu et de m'occuper un peu de moi.

Je suis consciente que la maladie de ma fille n'est pas facile à aborder par notre entourage. Il est difficile de voir que notre fille n'évolue pas de la même façon que les autres enfants, sans savoir ce qu'elle va devenir. Cependant ma fille est petite et rien n'est perdu.

Les gens adoptent 2 attitudes, soit ils se rapprochent soit ils prennent de la distance. Je suis bien placée pour savoir que ce n'est pas facile c'est pour cela que je ne juge personne et je ne leur en veux pas. Je dis juste que ça ne va ni améliorer ni dégrader la maladie de ma fille, cela risque de rendre triste notre fille quand elle s'en rendra compte.

Coté ami, j'ai une personne qui m'est très chère et dont l'aide est tellement précieuse. C'est le parrain de ma fille. C'est curieux mais je l'ai choisi comme parrain pour le remercier de son amitié. Il travaille comme soignant et je ne savais pas que ma fille serait atteinte d'une maladie rare. Depuis l'annonce de la maladie, il accompagne ma fille et moi même vers l'évolution.

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